Moutarde
noire, de Chine ou de l’Inde (Brassica
nigra), moutarde blanche (Sinapis
alba)
moutarde brune, joncée ou indienne (Brassica juncea)
moutarde sauvage (Brassica kaber)
famille des Crucifères(1) (Brassicacées)
moutarde brune, joncée ou indienne (Brassica juncea)
moutarde sauvage (Brassica kaber)
famille des Crucifères(1) (Brassicacées)
Petit est le grain de moutarde ;
Le feu Saint Anthoine vous arde,
Si jamais vous avez rien vû
Qu’il soit plus mince et plus menu ;
Il a toutefois grande force,
Si que sans vous donner d’entorse
Il tire les larmes des yeux ;
Mais apres on n’en rit que mieux :
Car la teste aussi bien il purge
Anonyme
La plante, de différentes hauteurs selon les sortes de moutardes, possède des feuilles vertes et de petites fleurs jaunes qui fleurissent du début de l’été à l’automne.
Columella, un fermier et auteur romain, découvrit la première recette en 42 : écraser les graines et mélanger avec du miel, de l’huile et du vinaigre. Il nomma la préparation mustem provenant de moût, les Romains la préparèrent ensuite avec du vin nouveau et son nom devint mŭstum (vin doux), puis mŭstum ardens (doit brûler).
La préparation de la moutarde fut introduite en Europe centrale et du Nord par les Romains. La légende veut qu’au XIVème siècle, Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, offrit à la ville de Dijon d’utiliser ses propres armes et sa devise "Moult me tarde" ("j’ai grand hâte"), qui devint "moult tarde". Cependant, la moutarde portait déjà son nom et la ville de Dijon était déjà célèbre pour ses moutardes (3).
Graines de moutarde jaune |
Les trois variétés de moutarde sont originaires d’Afrique du Nord et leur emploi est connu depuis très longtemps. Chez les Égyptiens, les graines accompagnaient les plats de viande pour masquer l’odeur de rance de la viande. Au IIIème siècle av. J.-C., le roi Perse Darius envoya à Alexandre le Grand un sac de graines de sésame représentant le nombre de ses soldats ; en retour, Alexandre le Grand lui renvoya des graines de moutarde, représentant le nombre et la force de son armée. Chez les Grecs, la moutarde était utilisée sous forme de cataplasmes contre les problèmes respiratoires, et en bain pour calmer les douleurs de pieds. Les Romains utilisaient les feuilles de la plante pour aider à la digestion. En Europe, la consommation des feuilles de sanve (4) cuites remonte à l’Antiquité. Dans le sud des États-Unis, où, au printemps, c'est une véritable tradition de récolter les feuilles de moutarde, on les fait cuire de longues heures avec d'autres feuilles (de navet notamment), du bacon, du vinaigre et du citron. La plante est très riche en ferments lactiques, ce qui permet de la transformer facilement en choucroute. En Chine, on confit au sel les racines de la moutarde joncée ou indienne.
Les Norvégiens consommaient de la moutarde et en 1234, le Comte de Conway exécuta aux Orcades quelques Vikings en les noyant dans des tonneaux de moutarde (5). En 1382, Philippe le Hardi comptait parmi ses richesses un stock de graines de moutarde de Dijon. Au Moyen Âge, pour obtenir la moutarde, on délayait de la poudre terriblement forte de grains de sénevé, préalablement écrasés au mortier, avec du moût de raisin. D’où le nom de la moutarde, dérivé de "moût ardent" qui traduit le goût relevé correspondant à ce qu’aimaient nos aïeux. Au XIVème siècle, la moutarde était cultivée à Saint-Germain des Prés. Plaque tournante du commerce des vins de Bourgogne vers la capitale, Dijon était réputée depuis le XIIème siècle comme capitale de la moutarde ; on y transformait les vins piqués en vinaigre que l’on utilisait avec presque tous les condiments. En 1752, Jean Naigeon(6) remplaça le vinaigre par du verjus, qui donna le petit goût acidulé distinguant la moutarde de Dijon des autres appellations.
La moutarde était considéré comme antiscorbutique grâce à sa grande richesse en vitamine C. Vasco de Gama, en route pour les Indes, en emporta de grandes quantités. D’autre part, pendant le siège de La Rochelle, on administra aux habitants de la poudre de moutarde incorporée à du vin blanc pour lutter contre le scorbut qui sévissait dans la ville. Autrefois, nos grand-mères utilisaient des "mouches de moutarde"(7), du sirop de vinaigrier et de mélasse pour soigner les bobos et calmer les douleurs.
En 1720, une anglaise de Durham, Mrs Clements, trouva la façon de séparer la graine de moutarde de son écorce. En France, ce n’est qu’au XIXème siècle que la moutarde préparée devint commune. En 1853, Maurice Grey de Dijon, inventa une machine qui compressait, moulait et tamisait les graines de moutarde en une seule opération. En 1866, Grey et son sponsor Auguste Poupon créèrent la marque désormais célèbre "Grey-Poupon". Au cours du XIXème siècle, naissent les grandes marques, ainsi celle née de la création du sieur Maille, établi rue Saint-André-des-Arts à Paris. C’est à cette époque qu’un maître vinaigrier de Dijon créa une fabrique d’où est issue la société Amora dont la marque fut déposée en 1919.
Les préparations de moutarde ont été adaptées au fil des siècles suivant les goûts des différents pays. Voici deux recettes de moutarde préparée :
Recette à l’ancienne : 500 g de farine de moutarde noire, 100 g de farine de blé, 12 g de toute-épice, 2 clous de girofle, 5 g de gingembre, 100 g de sucre, 100 g de sel. Le tout est dilué au verjus et gardé au frais.
Recette anglaise et américaine : graines de moutarde blanche, gingembre, curcuma, roquette. Le tout est moulu et dilué au vinaigre juste avant l’emploi.
L’huile de moutarde noire(8) est très utilisée dans le nord de l’Inde, dans la cuisine bengali. Les graines de moutarde en tant qu’épices entières doivent être ajoutées à la fin de la cuisson pour que leur arôme soit conservé. Elles sont appréciées par les Indiens du sud.
La moutarde noire est stimulante. On l’utilise le plus souvent en médecine naturelle sous forme de cataplasmes, mais avec parcimonie, pour soulager les rhumatismes et les douleurs locales. Ajoutée à de l’eau, elle peut constituer un bain de pied revigorant. D’autre part, le bain à la moutarde (une demi-tasse de moutarde mélangée à de l'eau froide, puis le tout est ajouté à l'eau du bain) est excellent contre les refroidissements et les frissons. Il stimule l'ensemble de l'organisme.
1. Étymologiquement : porte une croix. La moutarde porte des fleurs à quatre
pétales disposés en forme de croix grecque.
2. Poème anonyme diffusé par l’école de Salerne.
3. D’après Jean-Marie Pelt, Les épices, p. 173, et voir ci-dessous.
4. Moutarde des champs, sénevé (moutarde sauvage).
5. J.O. Swahn, The Lore of Spices : Their history and uses around the world, New York, Crescent Books, p. 26.
6. Vinaigrier, installa son premier atelier à Dijon en 1712.
7. Pour fabriquer les cataplasmes, on mélangeait la farine obtenue par broyage des graines à de la farine de lin et de l’eau tiède, ou on l’employait seule, délayée dans de l’eau tiède. On enduisait ensuite un tissu de cette préparation, et replié, on l’appliquait sur la zone à soulager pendant 10 à 15 minutes. Le cataplasme posé plus longtemps, des cloques se formaient et pouvaient se transformer en plaies ou même en gangrène !
8. Cependant, elle doit être très cuite, sinon elle est toxique. Elle ne doit jamais être utilisée pour les salades.
2. Poème anonyme diffusé par l’école de Salerne.
3. D’après Jean-Marie Pelt, Les épices, p. 173, et voir ci-dessous.
4. Moutarde des champs, sénevé (moutarde sauvage).
5. J.O. Swahn, The Lore of Spices : Their history and uses around the world, New York, Crescent Books, p. 26.
6. Vinaigrier, installa son premier atelier à Dijon en 1712.
7. Pour fabriquer les cataplasmes, on mélangeait la farine obtenue par broyage des graines à de la farine de lin et de l’eau tiède, ou on l’employait seule, délayée dans de l’eau tiède. On enduisait ensuite un tissu de cette préparation, et replié, on l’appliquait sur la zone à soulager pendant 10 à 15 minutes. Le cataplasme posé plus longtemps, des cloques se formaient et pouvaient se transformer en plaies ou même en gangrène !
8. Cependant, elle doit être très cuite, sinon elle est toxique. Elle ne doit jamais être utilisée pour les salades.
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